Brève histoire du katana japonais
Le Katana (Nihontō 日本刀 pour sabre japonais) est un type d’arme iconique provenant du pays du soleil levant 🗾🇯🇵, inscrit dans de nombreux domaines : pop-culture, jeux, films, animés, mangas, arts martiaux, …
Bien que les traits généraux soient connus du plus grand nombre, le sabre japonais n’a pas toujours eu la forme moderne qu’on lui connait aujourd’hui.
Survolons ensemble les évolutions qu’ont connues cette arme à travers le temps et les époques sur cette île à l’histoire si singulière.
Cet article n’a pas pour but d’aborder le sujet en profondeur mais simplement faire une introduction résumée. Si vous avez soif de savoir et désirez en apprendre plus, je vous redirige vers la bibliographie qui m’a servi à écrire cet article en bas de page.
JŌKOTŌ 上古刀
Sabres très anciens – Avant 1000
Les sabres en acier firent leur apparition au Japon durant la période Ko-fun 古墳時代 (250-538 après J.C.) et furent importés de Chine via la Corée, avec la façon de travailler l’acier et de façonner les sabres. La grande majorité de ces sabres forgés avant le VIIIe nous est parvenue en mauvais état.
Les premiers Jōkotō 上古刀 sont droits avec des côtés plats, parfois avec un double tranchant qui fut caractéristique des armes forgées au Japon au VIIIe siècle, parallèlement à l’épée droite à la chinoise.
KOTŌ 古刀
Sabres anciens – de 1000 à 1600
La période de Heian 平安時代 représenta une époque de paix célébrée comme l’âge d’or de la culture et de l’art japonais. Elle permit ainsi à la nouvelle classe de guerriers (bushi 武士) de voir le jour et de monter en puissance jusqu’à prendre le pouvoir. Cette perte de pouvoir de la part de la famille impériale créa des guerres sporadiques qui permirent aux forgerons d’affiner leurs techniques de forge et d’apporter des améliorations par rapport aux Jōkotō 上古刀 : on vit apparaitre les premiers Hamon 刃文 droits et les sabres devinrent plus longs et plus larges.
De plus, l’évolution des techniques militaires et particulièrement l’adoption du combat monté modifiera la ligne des sabres, plus courbés avec un tranchant unique, ce qui les rendit plus faciles à dégainer et à manier à cheval, mais renforça également la résistance aux chocs.
À cette époque on parlait encore de Tachi 太刀 et non de Katana 刀, la principale « différence » est qu‘il se porte pendant, suspendu à la taille, le tranchant de l’arme dirigé vers le bas. C’était une arme de cavalerie, à manier à une main.
Sur la période de Kamakura 鎌倉時代, la classe des samouraïs avait accumulé puissance et influence, générant une forte demande pour des armes fonctionnelles et efficaces. En parallèle, les forgerons commencèrent à signer les lames et développèrent des koshirae 拵 (montures) pour les sabres de cérémonie qui se distinguent des sabres de pratique. Les premières écoles de forge firent également leur apparition.
De plus, les invasions mongoles (1274 et 1281) poussèrent à des modifications dans la fabrication des sabres : le Hamon 刃文 devient plus large et plus complexe, mais un cœur en acier doux forgé au centre de l’arme est également ajouté pour gagner en résistance.
L’époque Nanboku-chō 南北朝時代 correspondit à une augmentation significative de la taille des sabres avec des tranchants pouvant atteindre 90 cm de long, voire plus. Durant cette période les samouraïs combattaient à pied plutôt qu’à cheval, ce qui affecta la taille et la conception de ces armes imposantes, mais peu maniables, les fameux Ōdachi 大太刀.
À l’époque de Muromachi 室町時代 de nombreux soldats commencèrent à utiliser des sabres appelés Uchigatana 打刀, armes qui pouvaient être maniées d’une main et plus adaptées à une utilisation dans des espaces clos, tels que les édifices et les forteresses. Ils mesuraient entre 60 et 70 cm, pouvaient se manier d’une main et étaient fixés sous un Obi 帯 (ceinture ou étoffe) avec le tranchant de l’arme orienté vers le haut; tandis que le Tachi 太刀 avait le tranchant orienté vers le bas, dans un fourreau suspendu à la taille par une ceinture.
SHINTŌ 新刀
Nouveaux sabres – de 1600 à 1790
La période d’Azuchi-Momoyama 安土桃山時代 correspondit à une renaissance commerciale favorisée par le développement de châteaux, l’installation de zones commerciales, la création de grandes voies de communication. Cela rendit plus aisé l’échange des techniques entre artisans, mais également le transport des matières premières comme les minerais.
Les shoguns 将軍 et daimyos 大名 prirent l’habitude de récompenser leurs subordonnés en leur offrant des sabres ouvragés. Les montures (koshirae 拵) devinrent plus chères et plus complexes, ornées d’or et de matériaux coûteux.
Pour cette période, les samouraïs portaient régulièrement une paire de sabres (daishō 大小) comprenant un sabre long (dai) d’au moins 60 cm et un wakizashi 脇差 plus court, mesurant entre 40 et 45 cm.
Cependant la qualité des lames de sabre tend à décliner, vu que l’accent est plus mis sur l’esthétique, mais également à cause de l’utilisation de fer de mauvaise qualité issu du commerce avec le Portugal ou provenant de l’ouest du Japon. L’époque d’Edo 江戸時代 vient renforcer cette tendance avec le shogunat de Tokugawa 徳川 qui instaura une paix durant près de trois siècles, les forgerons n’étant plus aussi demandés.
SHIN-SHINTŌ 新々刀
Nouveaux-Nouveaux sabres – de 1790 à 1876
À l’extrême fin du XVIIe siècle, le maître forgeron Suishinshi Masahide suscita un regain d’intérêt pour les sabres traditionnels, voyageant dans tout le Japon pour étudier des sabres anciens. Il marqua les sabres Shin-Shintō 新々刀 (« nouveaux-nouveaux sabres ») qui se devaient être aussi magnifiques et fonctionnels que les sabres Kotō 古刀, mais possédaient un Hamon 刃文 étroit, les distinguant nettement des sabres anciens.
Ces sabres perdurèrent jusqu’à la restauration de Meiji 明治時代 en 1868, lorsque le shogunat de Tokugawa 徳川 fut aboli et l’autorité de l’empereur restaurée.
GENDAITŌ 現代刀
Sabres modernes – de 1876 à nos jours
En 1876, le nouveau gouvernement de Meiji 明治時代 fit passer le Haitōrei 廃刀令, un édit interdisant le port des sabres en public. Il devint dès lors très difficile pour les forgerons de sabre de vivre de leur métier. La valeur des sabres traditionnels est davantage appréciée en tant qu’objet d’art et non d’arme fonctionnelle. En outre, l’armée et la marine japonaise se modernisent et les sabres ne sont plus considérés comme adaptés aux combats modernes. Seuls les officiers portaient des Guntō 軍刀 (sabre militaire) mesurant entre 60 et 65 cm de long.
En 1899 les sabres furent fabriqués en masse pour l’armée japonaise, réalisés à partir d’acier issu des fonderies modernes et forgés à l’aide de machines pour réduire les coûts et temps de fabrication. Le Hamon 刃文 fut réalisé dans de l’huile plutôt que dans de l’eau. Ce sont les sabres Muratatō, en référence au général Murata Tsuneyoshi 村田経芳, un des fondateurs des forces militaires modernes.
L’importante demande en sabres faites par les militaires fut à l’origine de la production de Shōwa-tō 昭和刀 au début des années 1930. Les sabres furent fabriqués à l’aide d’un acier travaillé dans une fonderie moderne. Les soldats devant acheter leur sabre avec leurs propres deniers, il fallait une arme moins chère que les modèles façonnés traditionnellement et les Shōwa-tō 昭和刀 furent produits en masse pendant la seconde guerre mondiale.
Après la seconde guerre mondiale en 1945, la production d’armes fut interdite au Japon et les forces d’occupation commencèrent à confisquer toutes les armes, sabres compris. Au bout d’une année, les autorités américaines déclarèrent que les sabres traditionnels possédaient une valeur culturelle et artistique, et la réquisition cessa. Cependant les forces d’occupation avaient entreposé un grand nombre d’armes blanches, et tout soldat pouvait demander à emporter chez lui des armes en souvenir. Ce qui fait que, dans les années 1950, il y avait peut être plus de sabres japonais aux États-Unis qu’au Japon.
En 1953, le gouvernement Japonais rétablit la possibilité de forger des sabres, mais des restrictions furent alors mises en place et perdurent encore, afin de s’assurer que les forgerons pussent créer des sabres traditionnels de grande qualité. On limita alors le nombre de sabres qu’un artisan était susceptible de forger à deux longues lames ou à trois lames plus courtes, permettant aux artisans de gagner raisonnablement leur vie dans le Japon d’après-guerre, tout en s’assurant une qualité de production.
Bibliographie et sources de références
Sabres Japonais d’exception – Art ancestral et secrets d’un grand maître
De Yoshindo Yoshihara aux éditions Nuinui
EAN13 9782889357956
ISBN 978-2-88935-795-6
Date de publication 30/09/2021